Mike Chanfreut - 29.01.2009

Un jeune artiste nyonnais
joue avec le feu
Mike Chanfreut dévoile sa démarche artistique à base d'essence sans plomb, de vin et de pigments de peinture. Un résultat détonnant.
On pourrait s'attendre à ce que les œuvres de Mike Chanfreut soient morbides, puisque son travail naît de la calcination. Pas du tout, l'artiste nyonnais donne naissance à des œuvres vivantes. Il résume sa démarche: il s'agit de brûler pour reconstruire.
Lors de la hausse du prix du pétrole, j'ai été très touché par la panique générale, raconte-t-il. J'ai souhaité utiliser l'essence comme pinceau. C'est une manière de mettre en valeur l'or noir et de donner un reflet de ce que nous sommes. Mike Chanfreut enflamme donc des planches de bois imbibées d'essence, où il mélange ensuite vin, pigments et vernis. Il en résulte, à l'intérieur de cadres dont les bords sont parfois écorchés à la hache, une indéfinissable matière réflective.
Une œuvre collective
Le reflet, justement, tient une place centrale dans sa nouvelle série exposée à la Galerie d'art Junod, jusqu'au 8 mars, sous le titre La passion du feu. Lors du récent vernissage, Mike Chanfreut a réalisé une démonstration.
Dans l'étroite cour intérieure de la galerie, les flammes ont provoqué un silence serein au sein d'une petite assemblée subjuguée. C'est que les flammes semblent courir sur la planche que l'artiste imprègne tour à tour d'essence, de vin, de pigments rouges et de vernis. Des flammes bleues naissent: il les appelle des impulsions électriques. Certains des spectateurs ont accepté l'invitation de l'artiste à jeter le contenu de leur verre de vin sur l'œuvre.
Cette pièce, conçue en collectivité, rejoindra le reste de l'exposition dans deux semaines. Mike Chanfreut parle de hasard maîtrisé. L'essence révèle des formes que je décide d'accepter ou pas. Dans le processus de création, l'aléatoire tient une grande place. Ses peintures s'appellent Degré 3.1, Big Bang ou Chemin de vie au départ d'un coin de mer. Mike Chanfreut prévoit de donner pour nom à ses prochaines créations des poèmes entiers. Une manière de lier les nombreux arts qu'il pratique, que ce soit la photographie, l'écriture ou la vidéo.
L'artiste considère que ses œuvres sont libres de sens. La matière obtenue à partir du mélange vin-essence-vernis-pigments forme des dégoulinades. Le propriétaire du tableau doit ou peut retourner régulièrement la planche carrée, afin de couper court aux coulures. C'est une manière de représenter l'évolution de la vie qui ne s'arrête jamais, explique le peintre. La signification du résultat final, différent selon l'éclairage, est laissée à l'analyse personnelle. Je recherche ainsi l'interactivité avec les spectateurs, précise-t-il. Entre sensualité, écorchures et brûlures, mes œuvres sont doubles, poétise l'artiste.
Cécile Gavlak
Photo Andrée-Noëlle Pot
29.01.2009