Le théâtre ambulant de Chopalovitch - 5.11.09

pour le théâtre
Le Théâtre amateur de Prangins (TAP) présente une pièce ambitieuse qui interroge sur la place de l'art dans la société. L'intrigue se situe en pleine occupation allemande, dans une bourgade serbe. Mais la problématique reste intemporelle et pourrait se dérouler n'importe où. Les comédiens du TAP sous la direction de la metteur en scène Fabienne Penseyres, s'attaquent à la pièce Le Théâtre ambulant Chopalovitch. Ce texte, engagé, écrit par Lioubomir Simovitch, raconte l'histoire de comédiens ambulants qui débarquent dans un village ravagé par la guerre, le sang et les armes.
Sur la place du village
Arrivée sur la place du village, la troupe Chopalovitch, à bord d'une roulotte, vient promouvoir son spectacle du soir: Les Brigands de Friedrich von Schiller. Airs d'accordéon et répliques déclamées. Mais l'accueil n'est pas celui escompté: vous n'avez qu'à creuser des tombes! rétorquent les villageois dans des huées. Faire du théâtre, c'est collaborer avec l'ennemi. Auprès d'un policier d'occupation arborant un insigne SS, le discours reste tout aussi violent: ça ne vous dérange pas, vous, que sur votre scène tombe l'ombre de la potence?
Dans la mise en scène élaborée par l'équipe, les spectateurs se trouveront sur la place du village, mêlés aux habitants de la bourgade. Une interaction qui met le public au cœur de l'intrigue. C'est une pièce impossible à monter avec des professionnels parce qu'il y a beaucoup de personnages et difficile à jouer avec des amateurs parce que c'est un spectacle exigeant, souligne la metteur en scène Fabienne Penseyres. Les comédiens du TAP ont relevé le défi, la tête haute. Le centre des Morettes de Prangins se retrouve investi de Chopalovitch, pour que le public se sente vraiment dans l'histoire. La buvette fera même partie du décor, parmi d'autres échoppes intégrées à la scénographie.
Le directeur du théâtre Chopalovitch - incarné avec force par Bernard Patry - répond aux attaques ambiantes: je désire aider les hommes à comprendre la vie. Je désire aussi les aider à l'oublier. Une formule éloquente. Si les instituteurs continuent d'enseigner en temps de guerre, si le boulanger fabrique encore son pain, l'artiste a aussi tout sa place.
«Le Broyeur»
Dans cette existence villageoise mise sur scène, un bourreau appelé «Le Broyeur» rôde, laissant derrière lui des traces de sang indélébiles. Le comédien Nicolas Martin incarne ce rôle avec nuances et «Le Broyeur» apparaît comme une incarnation de toute la complexité violente des rapports humains.
C'est une pièce qui demande au spectateur de se positionner par rapport à l'art, à la mort, à l'occupant. C'est un spectacle où il est difficile de ne pas se poser de questions, rappelle Fabienne Penseyres.
Cécile Gavlak
Photo: Alexis Voelin
05.11.2009